Interview Eric Scilien

Interview de l’auteur Eric Scilien publié chez Bookless Édition.

Éric, votre dernier roman, « Un petit roi » vient de sortir au format ebook sur le site Bookless-editions et au format papier chez Amazon en auto-édition. Pouvez-vous nous dire pourquoi, alors que vous êtes publié chez Jacques Flament, avoir choisi ce procédé ?

Ce choix s’inscrit dans une logique de parcours. J’ai publié mon premier recueil de nouvelles « Instinct de survie en milieu hostile » en Avril 2011 aux éditions Jacques Flament. En 2012 ont suivi deux autres titres, « Une gueule d’ange » (roman) et « Père et fils » (une longue nouvelle en format poche). Ensuite, Jacques à souhaité que je lui propose un roman plutôt que des nouvelles. Or, j’avais achevé ce recueil de textes – « Comment faire pour rencontrer quelqu’un » – et j’avais envie qu’il soit publié. J’ai donc décidé de m’en occuper moi-même en utilisant les services de CreateSpace Self Publishing. Ce qui m’a permis de le mettre en ligne sur Amazon et de trouver mes lecteurs. L’expérience m’a plu, j’ai pris plaisir à m’occuper de tout (la couverture, la mise en page…) et de ne rendre de compte à personne ! Je savais que j’aurai envie de renouveler l’aventure. Avec « Un petit roi », c’est chose faite et j’en suis satisfait. Maintenant, il est clair que pour moi, l’auto-édition a son intérêt mais n’est pas une finalité. Il s’agit plutôt d’une solution ponctuelle. Pour un auteur, je reste convaincu que l’idéal reste de collaborer avec un éditeur. Et autant que possible, un éditeur qui croit en son auteur et qui est prêt à mouiller la chemise pour le faire connaître.

Depuis quand écrivez-vous et quelle part de votre temps occupe cette activité ?

Après un long passé de lecteur, j’ai publié mes premières nouvelles dans des fanzines au début des années quatre-vingt dix.

La part consacrée à cette activité varie selon les périodes et mes différentes obligations, mais je sais faire ce qu’il faut pour me dégager du temps et me donner les moyens d’aboutir mes projets. Les journées sans écrire une ligne sont rares.

Qu’est-ce qui vous pousse à le faire ?

Je n’en sais rien et je ne crois pas que cela ait beaucoup d’importance finalement… En tous cas, j’ai cessé de me poser la question. Il m’est arrivé à deux ou trois reprises de me demander si je n’aurais pas mieux à faire qu’écrire. Si j’avais su peindre ou dessiner, j’aurais peut-être emprunté une autre voie.

Quels sont vos sujets d’inspiration ?

D’abord, les questions fondamentales : « Qui suis-je ? Où suis-je et où vais-je ? ». Ramené dans un langage du XXIème siècle : « Mais qu’est-ce que je fous là ? ». À travers des histoires, des personnages, des situations, j’essaie de comprendre le Monde. Mais j’écris aussi, et peut-être avant tout, pour distraire – pour me distraire et distraire les autres. Se distraire est une activité fondamentale. Ainsi que l’écrivait Pascal dans ses pensées :

« Un roi sans divertissement est un homme plein de misère ».

Sur un plan plus intime, tout ce qui est resté coincé dans un endroit où rien ni personne ne pourra l’y déloger – quelque part entre le cœur et les tripes – m’est source d’inspiration. On écrit sur ses désirs, mais aussi sur ses failles et ses déceptions. 

La seule période de mon existence où l’inspiration m’a fui a coïncidé avec mes années de psychanalyse. Ce pourquoi j’ai préféré y mettre fin avant terme. Ma psychanalyste a tenté – en vain – de me convaincre de poursuivre. Le travail n’était pas terminé, selon elle. Sans doute. Mes vieux démons sont toujours là. Mais tant pis. J’ai décidé de garder mes névroses et de composer avec elles. La vie n’est pas assez longue pour oublier. Il faut apprendre à vivre avec son histoire. Et avec qui on est.

Avez-vous déjà essuyé des refus d’éditeurs ?

Oui bien sûr, comme tout aspirant écrivain. Il ne faut pas avoir peur de l’échec, c’est le passage incontournable de toute victoire. Permettez-moi d’ajouter cette citation personnelle : « Les plus belles victoires se forgent dans l’amertume de la défaite ». J’en suis persuadé.

Quels sont vos auteurs de référence ?

Roman Gary, l’archétype de l’écrivain. « Les promesses de l’aube » reste une de mes lectures parmi les plus marquantes. S’il est un auteur dont on puisse dire « sa vie est un roman », c’est bien lui. Même sa biographie est passionnante.

Tout Maupassant et notamment ses nouvelles. C’est un écrivain indémodable.

  • Agota Kristof et sa triolgie : « Le grand cahier », « La preuve », et « Le troisième mensonge ».
  • James Ellroy pour sa puissance narrative, l’ambiance « U. S. » et le quatuor de Los Angeles.
  • Edgar Hilsenrath pour « Nuit », un livre poignant, mais je préfère prévenir : âmes sensibles, s’abstenir.
  • Le recueil de nouvelle de Craig Davidson « De rouille et d’os », bien supérieur au film du même nom. Un vrai plaisir de lecture.

Avez-vous un autre roman en chantier ?

Je n’en ai pas un, mais plusieurs !

Ceci étant, Jacques Flament m’a passé commande (à moi comme à neuf autres de ses auteurs), pour écrire une version de « Bunker » – un court roman à contrainte : 217 personnes se retrouvent coincées dans un espace fermé, dix mètres sous terre… chaque roman étant indépendant et pouvant se lire séparément. Ma version est en cours d’écriture et le prochain manuscrit que je remettrai à un éditeur sera donc celui-là.

Qu’attendez-vous d’un éditeur ?

D’abord, qu’il m’édite parce qu’il apprécie ce que j’écris, et qu’il vende mes livres par centaines de milliers, si possible !

À mon sens, une forme de « partenariat » doit s’instaurer entre auteur et éditeur, de façon à ce qu’ils mènent des actions conjointes de promotion/communication.

Avez-vous des conseils à donner à Bookless ?

Des conseils, non. Mais peut-être des idées, des suggestions…

Comme offrir des ebooks gratuits d’auteurs tombés dans le domaine public, par exemple. Ou bien chercher à se développer par le biais de partenariats : une petite maison d’édition publiant en version « papier » pourrait être intéressée pour travailler avec Bookless sur des versions numériques de tout ou partie des son catalogue – sachant que l’inverse pourrait aussi être envisagé. Même idée pour des revues littéraires.

Ensuite, travailler sur l’identité Bookless – identité graphique notamment, mais pas seulement.

Solliciter un ou plusieurs écrivains connus – des écrivains que vous appréciez, évidemment, pour qu’il parrainent Bookless, par exemple en vous confiant une nouvelle inédite pour une publication numérique à petit prix.

Proposer aux lecteurs un forfait attractif (de l’ordre de 15 ou 20 €) qui leur donne accès au choix à plusieurs œuvres dans votre catalogue.

Pour conclure cette interview, je souhaite longue vie à Bookless !

Merci Corinne et à bientôt pour de nouveaux échanges.

Éric